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Un pied dans le plat de résistance

par | 13 octobre 2021


Solidarité et convivialité. Au printemps dernier, l’association Le plat de résistance a ouvert sa cantine militante et participative à la ferme, dans la commune de Combrand (79). Une cantine de lutte où porter un engagement fort pour l’autonomie alimentaire et l’accès pour toutes et tous à des repas de qualité, par une tarification à prix libre. Photo-reportage.


Une cantine de lutte

C’est une bande de copains qui est à l’origine du Plat de résistance en 2018. Trois paysans et paysannes et trois demandeurs d’emploi. L’idée était d’ouvrir une cantine paysanne, avec une partie à la ferme et une partie mobile. “Au début on a surtout développé la partie mobile, explique Kevin Certenais, animateur et coordinateur de l’association. On allait sur des manifestations, des grèves, pour aller soutenir des luttes qui nous semblent importantes, que ce soient les marches pour le climat des étudiants ou les mouvements contre la réforme des retraites.” Avec au cœur du projet les valeurs d’entraide, mais aussi l’envie de donner corps localement aux notions de souveraineté et d’autonomie alimentaire. “Nous prônons un autre système que le système capitaliste qui exploite aussi bien la nature que l’être humain. Nous réfléchissons, à notre humble échelle, à une autre organisation de l’économie à travers la question de l’alimentation, et à la manière de rendre une alimentation de qualité accessible à toutes et à tous.”

Kevin Certenais, qui fait partie des fondateurs, est salarié de l’association depuis le mois de septembre. Il n’en est pas à ses premières actions de lutte pour l’alimentation et l’autonomie. Il avait participé en 2018 à La ZAD a la patate (culture de légumes pour les zadistes de Notre-Dame-des-Landes) et en 2020 au Bocage a la patate. Cette autre initiative solidaire, portée pendant le premier confinement, consistait à faire pousser des légumes sur des terrains mis à disposition, pour les donner ensuite aux personnes les plus fragiles.

La transformation d’une ancienne porcherie industrielle

La cantine à la ferme a ouvert en mai dernier, dans la commune de Combrand dans le nord des Deux-Sèvres. Elle est installée dans une ancienne porcherie industrielle de 400 m² entourée d’un hectare de terrain. Dès 2018, une partie “production” y a été développée, avec un élevage de truites en aquaponie et la plantation de fruitiers. Huit poules fournissent la cantine en œufs. Kevin Certenais est propriétaire du lieu et a signé cette année avec l’association une convention stipulant qu’il lui mettait gratuitement à disposition. “C’est gratuit parce qu’on est contre la propriété lucrative et le fait qu’on puisse se rémunérer parce qu’on a un capital immobilier. C’est une position politique ! ” Cette question de la propriété sera abordée à l’assemblée générale du 23 octobre, et un groupe de travail a été mis en place pour réfléchir tout au long de l’année aux questions de propriété et de gouvernance.

“Le temps de cuisine est aussi un moment privilégié”

Depuis la création de l’asso, des voisins, voisines, habitants de la commune sont venus gonfler les rangs. Le conseil d’administration compte désormais 11 membres, et une quinzaine de personnes font partie de la “commission cantine”. Chaque mercredi et vendredi matin, un groupe de deux ou trois personnes fait la cuisine. Le mercredi c’est pour la cantine à la ferme, et le vendredi c’est pour livrer au tiers-lieu La GOB, situé à Bressuire. Ces bénévoles sont des personnes du canton, essentiellement des femmes, souvent à la retraite, même s’il y a aussi quelques trentenaires. “Elles s’engagent pour le côté militant, mais aussi parce qu’on se marre bien !, raconte Kevin Certenais. On dit que le repas est un temps convivial ; le temps de cuisine est aussi un moment privilégié, d’échange, d’entraide et de convivialité.

Marie-Anne Thébault, 69 ans, est sympathisante de l’association depuis ses débuts. “Au départ il y avait des chantiers collectifs pour aménager le lieu. Le bricolage ce n’étais pas trop mon truc, mais j’étais présente pour faire la cuisine pour tout le monde.” Quand elle le peut, elle continue de venir préparer les repas à la ferme. “J’ai un CAP cuisine ! Je n’ai jamais exercé, mais j’ai pu apporter quelques connaissances au Plat de résistance.

Une cantine participative et à prix libre

Ici le prix du menu est indicatif et libre : « Zéro euro, c’est dans l’idée de la bonne bouffe pour tout le monde et tout le temps. Quatre euros, ça nous permet de payer des produits bio, locaux et paysans. Sept euros, ça paye tout ce qui est eau, assurance, gaz, électricité. Dix euros, c’est pour le salariat, et douze euros, c’est pour faire tourner l’asso et nous permettre de soutenir les luttes, les grèves. On met des sous de côté pour les jours où on va soutenir des actions.”

Le mercredi, une vingtaine de personnes viennent déjeuner au Plat de résistance, des paysans et paysannes surtout, qui viennent avec des voisins, des copains. Pour y manger, il faut être adhérent de l’association. La cantine est dite “participative” car ce sont les personnes qui viennent manger qui se servent, débarrassent, font leur vaisselle, l’essuient, et passent l’éponge ! Les structures locales aussi commencent à s’approprier le lieu, et les liens sont tissés avec les centres socioculturels du secteur, Cerizay, Mauléon, mais aussi La Colporteuse à Argentonnay (79). La mayonnaise prend. Il faut dire que localement, il existe un vrai tissu de structures et de personnes engagées, mais aussi de paysans.

Des produits locaux en grande majorité

Légumes, fruits, volailles, pain, fromage de chèvre, lentilles, huile, porc… tous les produits cuisinés proviennent de quinze fermes situées dans un rayon de 20 km autour de Combrand. “Il n’y a que pour quelques céréales, riz, sarrasin, quinoa, qu’on achète à la Biocoop de Bressuire.” Pour élaborer ses repas, l’équipe fait aussi de la récup, quand il y a de la suproduction de tomates ou de potimarrons par exemple.

Un rendez-vous culturel et politique mensuel

Désormais, un samedi par mois, est programmé un événement à la croisée de la culture et de la politique, suivi d’un repas.
> 28 octobre : sortie de chantier d’une gesticulation politique : “Les bienveillants ou le dévoilement de la stratégie néolibérale” de Alice Dumoulin et Corinne Lepage
> 13 novembre : projection du film “Quand les femmes ont pris la colère de Soazig Chappedelaine et René Vautier
> 11 décembre : présentation du spectacle “Douze femmes en colère” de et par Cécile Delhommeau et Anthony Rouliquen


Rédaction : Julie Sibieude & Hélène Bannier
Photo : Annabelle Avril

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