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Sécurité alimentaire : le Bocage a la patate… et des idées

par | 12 juin 2020


Dans le bocage bressuirais, des citoyens de tous horizons se sont regroupés autour du maraîcher Kevin Certenais pour réfléchir à l’après-Covid et anticiper les conséquences de la crise économique, sociale, et donc alimentaire. Le collectif s’appelle Le Bocage a la patate. Depuis un mois il plante des légumes bio sur des terres mises à disposition pour que puissent ensuite en bénéficier les habitants les plus fragiles. Et promeut l’idée d’une sécurité sociale de l’alimentation. Leur initiative inspire, notamment dans la Vienne.


Anticiper la crise économique

Le collectif deux-sévrien sème les graines de la solidarité (photo le Bocage a la patate)

Claire Chevalier, retraitée de l’enseignement agricole, est aujourd’hui une membre active du collectif le Bocage a la patate. Et pour elle cela ne fait pas de doute : “Après la crise sanitaire, il y aura inévitablement une crise économique, sociale et donc alimentaire. Le nord Deux-Sèvres est à la fois riche et fragile, avec de nombreuses TPE et PME mais des emplois souvent précaires ou à durée déterminée, et des salaires relativement peu élevés.” D’où cette idée de cultiver des légumes sur des terres communales mises gracieusement à disposition, pour en faire bénéficier des familles exposées à la précarité et aux difficultés financières. L’initiative émane d’un maraîcher bio du secteur, Kevin Certenais, qui n’en est pas à son coup d’essai en termes de légumes solidaires. En 2018, il avait créé La ZAD a la patate, et réuni des habitants qui ensemble avaient cultivé des légumes pour les zadistes de Notre-Dame-des-Landes, au moment de leur expulsion. Cette première expérience a permis de mobiliser rapidement des forces vives dans les communes de Combrand, Le Pin, Cerizay, Cirières, Saint-Sauveur-de-Givre-en-Mai et La Petite-Boissière, pour la création du Bocage a la patate. Une quinzaine de citoyens composent le noyau dur du collectif, et comme la solidarité elle aussi est contagieuse, le nombre de bénévoles augmente chaque jour avec l’arrivée de jeunes actifs, de familles, d’agriculteurs, de retraités, d’élus, de paysans, de demandeurs d’asile, de bénéficiaires du RSA, de chômeurs… des citoyens tous prêts à donner de leur temps et à relever le défi d’une alimentation saine, locale et auto-produite.

Des légumes solidaires dans le Bocage… et dans la Vienne

Le contexte sanitaire a largement facilité la prise de contact avec les élus des communes du Bocage, qui ont été nombreux à accueillir favorablement cette initiative et à mettre à la disposition du collectif plusieurs terrains communaux. Des particuliers ont aussi prêté des parcelles. “Une fois les terres obtenues, il nous fallait des plants, et des bras ! explique Claire Chevalier. C’est pourquoi nous avons diffusé un appel à mobilisation et une collecte de dons de plants. Les nombreux retours ont permis de passer à la phase de concrétisation.” C’est ainsi que depuis un mois, le collectif plante sur plus de 5000 m² des pommes de terre, courges, courgettes, mogettes, choux et poireaux… des légumes faciles d’entretien et qui se conservent durablement. Le tissu local d’associations solidaires, très fort dans le nord Deux-Sèvres, contribue largement à cette dynamique, notamment dans l’identification et l’implication des futurs bénéficiaires invités à prendre part à la culture des terres. Facilement duplicable, l’action du Bocage a la patate inspire sur d’autres territoires. Et c’est ainsi que dans la Vienne, l’association Vienne et Moulière Solidarité mène depuis la fin du confinement une initiative similaire. “Dans la commune de Liniers, un agriculteur nous a prêté un terrain où nous avons planté 100 kg de pommes de terre donnés par Bio Saintonge Distribution à Saint Jean d’Angély et par le Gamm Vert de Saint Julien l’Ars, explique la directrice de l’association Stéphanie Auriche. A Sèvres-Anxaumont c’est Grand Poitiers qui nous a temporairement mis un terrain à disposition. Les bénévoles de Vienne et Moulière Solidarité viennent d’y semer 400 graines de courges offertes par l’association Cultivons la Biodiversité, et 20 kg de bulbes d’oignons, donnés à nouveau par Bio Saintonge Distribution.” En fin d’été, les récoltes seront remises aux acteurs locaux de l’aide alimentaire.

Dans l’est de Grand Poitiers, une quinzaine de bénévoles de l’association Vienne et Moulière Solidarité sont mobilisés

Pour une sécurité sociale de l’alimentation

En France, avant même la crise sanitaire liée au Covid, cinq millions de personnes dépendaient de l’aide alimentaire. Un chiffre qui risque de fortement augmenter ces prochains mois, et qui incite le Bocage a la patate à promouvoir l’idée d’une sécurité sociale de l’alimentation : une allocation d’environ 150€ par mois et par personne, versée par une caisse locale, donnerait à chaque foyer la possibilité de faire ses courses auprès de producteurs locaux conventionnés et agréés sur la base de critères environnementaux, sociaux et éthiques. Cette somme ne couvrirait pas la totalité des dépenses alimentaires, mais faciliterait l’accès à des produits sains et de proximité pour l’ensemble de la population. La réflexion est d‘ores et déjà menée à l’échelle nationale par trois principaux réseaux : Ingénieurs sans frontières-AgriSTA, Réseau Salariat et les CIVAM. Ils réfléchissent actuellement à la rédaction d’un texte commun qui sera proposé prochainement aux élus dans le but de faire évoluer les mentalités. Pour une alimentation saine, durable et pour tous.


Rédaction : Julie Sibieude
Photo : Virginie Colin-Cadu / Le Bocage a la patate

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