Ça roule ! Et à vélo électrique, de plus en plus, que ce soit sur les pistes cyclables des villes, sur les routes de campagne, pour les déplacements du quotidien de style « vélotaf » ou pour les vacances en vadrouille. Le vélo à assistance électrique (VAE) représente aujourd’hui 30% des vélos vendus, soit 671 000 par an selon les derniers chiffres de l’Union Sport et Cycle. Des alternatives à l’achat de VAE neufs existent cependant : on peut faire installer un kit sur son vélo musculaire. Ou le fabriquer soi-même.
« Ma motivation pour électrifier mon vélo ? Les côtes qui m’entourent ! » Emmanuelle habite dans le sud Vienne, au creux d’une vallée où le dénivelé est dissuasif pour la plupart des cyclistes amateurs. Mais avec une assistance électrique, rejoindre le bourg (5 km) ou les petites villes voisines (entre 10 et 15 km) devient à portée de pédales.
La sexagénaire avait déjà un vélo musculaire, presque neuf, confortable. Elle a choisi de le garder et de l’équiper d’un kit électrique plutôt que d’acheter un nouveau vélo : « C’était environ deux fois moins cher », se souvient-elle. David Sorin, installateur à Béruges, a vérifié que son vélo était apte à recevoir l’équipement (un cadre solide, de l’espace suffisant sur le cadre ou le porte-bagages pour poser la batterie), puis ils ont choisi ensemble le type de modification. Moyeu de la roue ou pédalier pour le moteur ? Quelle puissance de la batterie selon les usages et le poids du vélo ? Un boîtier de commande installé à droite ou à gauche sur le guidon ? « Après 5 ans d’utilisation, je suis très contente, affirme Emmanuelle. La batterie tient bien et se recharge rapidement. Je n’hésite plus à utiliser mon vélo… alors qu’avant il restait un peu trop au garage. »

Plus économique et plus écologique
Installé à Béruges, à l’ouest de Poitiers, David Sorin a fondé Kit Vélo Elec en 2011. Il était alors l’un des premiers indépendants en France à se lancer sur le marché de la fabrication et du reconditionnement de batteries pour vélos électriques. Il fut aussi le premier à obtenir l’agrément d’une collectivité, celle de Grand Poitiers, pour bénéficier des aides à l’achat d’un VAE via l’installation d’un kit électrique.
« Pour un particulier, installer un kit sur son vélo musculaire permet de faire des économies, c’est moins cher que d’acheter un vélo neuf. C’est aussi plus globalement écologique car cela évite de multiplier la flotte de vélos.» David Sorin, fondateur de Kit Vélo Elec
La batterie est prévue pour durer entre 3 et 5 ans (environ 1000 charges). Au-delà, elle perd 50% de son autonomie. Il est alors possible de la prolonger par le reconditionnement. Une démarche éthique indispensable pour économiser la ressource en métaux (acier, fer…) dont certains sont des métaux rares (lithium, nickel, cobalt, manganèse). Une étude menée dans un atelier de réparation en 2022 a établi que sur 150 batteries collectées et analysées, 68% auraient pu être réparées simplement (la panne émanant de la carte électronique, du câblage ou d’un connecteur) et 28% auraient pu être reconditionnées, avec des cellules encore performantes.

Lutter contre l’obsolescence programmée
Ingénieur de formation, bricoleur et passionné par les enjeux de transition bas carbone, Yoann Gruson-Daniel a fondé eAska pour lutter contre l’obsolescence programmée des batteries. Pour assurer l’autonomie de son déplacement, il s’est intéressé à la compréhension des moteurs. De cet apprentissage il a monté un module de formation de cinq jours pour électrifier soi-même son vélo, qu’il a notamment proposé cet automne en Charente, à l’écolieu Du coq à l’âme. Les stagiaires installent un moteur haut de gamme, réparable, et construisent une batterie à longue durée de vie.
« Fabriquer soi-même son équipement aide à en comprendre le fonctionnement et permet de réparer. C’est aussi un excellent exercice pour gagner en confiance en soi. Et ça rend libre ! » Yoann Gruson-Daniel, fondateur eAska
Comprendre les systèmes électriques qui nous entourent permet de mieux saisir les enjeux miniers, ceux du recyclage et aussi de la sécurité en apprenant à programmer sa batterie pour optimiser la charge, rallonger sa durée de vie et minimiser les feux de lithium. Au-delà du bricolage, Yoann transmet une vision militante du déplacement. Utiliser sa voiture signifie rejeter plus de 2 kg de Co2 par litre de carburant. Est-il vraiment utile de déplacer une voiture de 1,5 tonne pour aller acheter son pain ? « Le vélo électrique permet de se déplacer plus loin qu’un vélo musculaire. Le relief est aplati et on peut transporter sans problème 50 kilos de charge, ce qui est en général suffisant pour les déplacements du quotidien.» Gruson-Daniel est lucide sur le marché du VAE qui sont produits par des entreprises qui veulent s’enrichir… d’où une réparabilité compliquée et l’obsolescence programmée des batteries, un coût caché important quand on décide de pédaler électrique.
Rédaction et photos : Claire Marquis