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Cuisine vivante, qui l’eût cru ?

par | 20 mars 2019

cuisine vivante


Marie-Annick Nardo tient La Palette de l’Île sous les halles de Rivedoux-Plage, dans l’Île de Ré. Elle a aussi été la cuisinière de La Bonne Quille pendant plusieurs années à Poitiers. Son credo, c’est la cuisine vivante. Ou l’art de cuisiner le végétal pour qu’il apporte ses bienfaits au corps humain tout en régalant les yeux et les papilles. Interview.


Qu’est-ce qu’on appelle la cuisine vivante et quels sont ses bienfaits ?

Marie-Annick Nardo cuisine vivante

On appelle “vivante” une cuisine exclusivement végétale, à base de légumes, de graines germées et de pousses, toujours crus ou bien cuits à une température n’excédant pas 42°C. C’est aussi pour cela qu’on l’appelle cuisine crue, ou crusine. Les plantes, par la photosynthèse, captent l’énergie du soleil et la transforment pour grandir. L’alimentation crue permet au corps humain de récupérer toute cette énergie, à condition bien sûr d’utiliser des produits sans traitement chimique, et le plus tôt possible après leur récolte, sans passage de longue durée en chambre froide. La graine, quelle qu’elle soit, met toute son énergie à se développer au moment de la pousse, c’est-à-dire jusqu’à ce que les deux premières feuilles se forment. C’est à ce moment-là que les propriétés nutritives sont les plus importantes. Comme le produit ne subit aucune cuisson, il garde toutes ses vitamines, ses nutriments, ses oligo-éléments. On préserve aussi les enzymes, qui sont essentielles pour la digestion. Mais “cru” ne veut pas dire que l’on n’intervient pas du tout sur le légume, il existe plusieurs techniques pour le crusiner et le magnifier sans l’altérer. La déshydratation par exemple permet d’apporter une texture et un goût différent au légume tout en lui conservant ses qualités. La lactofermentation est également une technique très ancienne de conservation, utilisée depuis le néolithique ! Elle consiste à laisser macérer les aliments avec du sel et de l’eau. Le phénomène de fermentation naturelle qui s’ensuit permet de préserver les qualités nutritives des aliments, et de plus leur teneur en certaines vitamines et enzymes est augmentée, ce qui favorise la digestibilité et l’assimilation par l’organisme.

Quel est votre parcours de cuisinière ?

Je suis rentrée en cuisine en 1998 en prenant la suite de mon frère, et à l’époque notre restaurant proposait des tartines de pied de cochon et de la queue de bœuf ! (rires) C’était loin d’être vivant ! En 2002 j’ai repris un autre restaurant et nous étions deux en cuisine, nous avons développé beaucoup de choses au niveau de la créativité et le végétal y avait beaucoup de place. C’est à ce moment que j’ai commencé à utiliser un extracteur de jus et à beaucoup m’amuser avec tout ce que l’on pouvait faire à base de végétaux. En 2008, j’ai démarré une formation en macrobiotique, une technique mise en place par un médecin japonais après Nagasaki et Hiroshima pour aider les gens à se libérer des métaux lourds qui intoxiquaient leur corps. L’école macrobiotique est différente de l’alimentation vivante, on est sur du cuit. Mais lors de cette formation j’ai eu accès à une initiation à la médecine chinoise et à toute l’énergétique qui va autour de ça, je m’en suis vraiment imprégnée, et je me suis vraiment retrouvée là-dedans. C’était une évidence : la cuisine doit passer par l’élément santé. J’ai trouvé à ce moment-là la raison inconsciente pour laquelle j’étais entrée en cuisine. J’ai expérimenté cette cuisine-là autour du végétal dans le restaurant. Ensuite, mon plus jeune fils a déclaré un diabète, et j’ai ciblé son alimentation pour en limiter les effets au maximum. Les résultats ont été très positifs sur son état de santé, et je me suis rendue compte qu’une alimentation ciblée peut avoir des effets bénéfiques sur le corps.

Vous donnez aussi des cours de cuisine…

Oui, j’aime amener les gens à une prise de conscience sur l’alimentation, et sur la nécessité de consommer du végétal de façon réfléchie, en fonction de la saisonnalité, de la qualité des produits, de l’émotion dans laquelle ils se trouvent… en gardant une notion essentielle : le plaisir. Mais attention, je ne suis pas une extrémiste ! Moi-même je ne suis pas arrivée à une alimentation exclusivement crue de but en blanc, ça a pris plusieurs années. Il est important que chacun puisse ressentir cette nouvelle façon de cuisiner, pour laisser parler sa créativité et son inventivité. C’est ce résultat que je vise avec les cours de cuisine que je mets en place. Mais il faut procéder par étapes : commencer par amener les gens à intégrer plus de légumes dans leur alimentation quotidienne, et aller progressivement vers la cuisine vivante avec des jus et des graines. Les poissons crus sont certes des aliments vivants, mais quand on voit l’état de pollution des mers, et que l’on sait que les poissons sont imprégnés de métaux lourds, c’est trop toxique ! Il faut regarder ce que la nature nous offre à portée de main. En allant se promener autour de chez soi on trouve une variété de plantes accessibles à tous. Le pissenlit, les poireaux sauvages, les orties, l’ail des ours, la cressonnette…. il faut apprendre à voir, et à reconnaître ces aliments délicieux et forcément de saison.

Une recette simple et gourmande de cuisine vivante à nous proposer ?

Vous pouvez préparer des makis de légumes à l’ail des ours, c’est la saison en ce moment. Il vous faut des feuilles de nori, un beurre de tournesol (que vous obtenez en mixant une tasse de graines de tournesol réhydratées et une cuillerée à soupe d’huile d’olive, et que vous pouvez assaisonner de petits dés d’oignons rouges et de la coriandre), une carotte râpée, une betterave marinée et râpée, de la choucroute crue, des petites fleurs de chou-fleur et brocolis, des graines germées, de la mâche, du pissenlit, de l’ail des ours.
Étalez une belle couche de beurre de tournesol sur le premier tiers de la feuille de nori le plus proche de vous, en laissant une petite marge sur l’avant de la feuille. Superposez ensuite l’ail des ours, les différents légumes et les graines germées. Roulez la feuille de nori de façon assez serrée puis découpez en quatre ou cinq tronçons.


Propos recueillis par Virginie Colin-Cadu
Photo : Circuit Court Communication et Marie-Annick Nardo

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