Dans le monde, 2,1 milliards de personnes n’ont pas accès à l’eau potable selon l’UNICEF. Paul Minot, entrepreneur et ingénieur à Valence-en-Poitou (86), a inventé FiltraLife Solution, une machine nomade capable de purifier toutes les sources d’eau, rivière, lacs, puits, mares, étangs – à l’exception de l’eau de mer. Il compte la commercialiser à grande échelle. Interview.
Comment est née l’idée de FiltraLife Solution ?
J’ai une entreprise de télécom dans un petit village du sud de la Vienne. J’ai conçu les locaux de manière éco-construite pour les chauffer à moindre coût et j’ai installé un système de captation d’eau de pluie pour alimenter les chasses d’eau, lave-linge etc. Avec mon cerveau d’ingénieur j’ai voulu pousser le curseur, et rendre l’eau de pluie potable. C’est ce qui m’a conduit à la création de FiltraLife.
Du fait de mon parcours professionnel, j’ai une bonne connaissance de l’Afrique et de ses problèmes d’accès à l’eau. C’est pourquoi j’ai pensé cette machine pour des milieux hostiles. Elle est conçue de façon à ne pas tomber en panne : entièrement mécanique, elle fonctionne sans électricité, sans électronique. Destinée à des populations à faibles ressources, elle n’a pas de consommables à changer, qu’il faudrait racheter. Il suffit juste de nettoyer le filtre, tous les mois environ, selon les eaux brutes. Notre objectif, avec beaucoup de modestie, c’est donc d’apporter une solution dans des régions où les personnes n’ont pas accès à l’eau potable. Et c’est le cas de deux milliards de personnes dans le monde aujourd’hui.
Concrètement, comment ça marche ?
Il faut remplir le réservoir de 121 litres avec de l’eau du puits ou de la rivière et actionner la poignée semi-rotative. L’eau immédiatement propre sort par le robinet. La machine peut traiter jusqu’à 1300 litres par heure. Le laboratoire Ianesco, qui est certifié par le ministère de la Santé, nous a accompagnés dans la réalisation des analyses. Nous avons fait des tests sur la Dive (ndlr : rivière traversant Valence-en-Poitou) et en sortie de machine, l’eau est potable. La machine filtre tout. Je ne peux pas donner plus de détails car il y a un brevet déposé.
A quel stade de développement êtes-vous aujourd’hui ?
Après un an, nous sommes en phase de commercialisation. Notre cible, ce sont bien les personnes qui n’ont pas accès à l’eau potable mais le cheminement pour les atteindre ce sont les États, les armées, les ONG et les multinationales. Ce sont eux nos clients. Notre machine n’est donc pas vendue à l’unité. On ne veut la vendre que par containers.
FiltraLife est fabriquée à 80 % par une usine métallurgique qui se trouve à 40 minutes de Valence-en-Poitou. Elle est assemblée en partie par le prestataire qui se charge de la découpe, et le reste est assemblé ici par deux salariés qui peuvent faire 16 machines par jour. On peut viser les 320 machines par mois avec seulement deux salariés. Et si on a des commandes plus importantes, on peut s’adapter.
Vous cherchez à vous développer d’abord en Afrique. Viserez-vous aussi l’Europe, et notamment la France, où les problèmes d’eau commencent à émerger ?
Nous sommes approchés par des grands groupes en Europe. L’été dernier, des maires en France m’ont contacté. Pour l’instant, nous ne vendons pas la machine à l’unité, mais si plusieurs maires s’associent pour une commande commune, pourquoi pas.
Pourquoi lancer directement une production industrielle à grande échelle ?
Je suis un entrepreneur, je gère plusieurs entreprises. J’ai déjà un savoir-faire, une vision des choses, j’ai la chance que mes entreprises fonctionnent, je génère de la richesse, et avec cette richesse je génère de l’emploi. Je vois gros directement !
Rédaction et photos : Claire Marquis