A La Couarde, dans l’île de Ré, l’association Le Bocal vient d’ouvrir un lieu de rencontre enfant-adulte avec un café associatif, une ressourcerie, des ateliers et activités. Un espace de vie sociale à hauteur d’enfant, pour créer du lien et sortir les parents de l’isolement.
Dans les ruelles calmes de La Couarde ce samedi matin, des tout-petits enfants et leurs parents poussent la porte de l’association. C’est le jour de la « cabane à histoires ». Barbara, co-présidente et bénévole de l’association est installée sous l’escalier du local et lit des albums à des tout-petits captivés. Le Bocal a inauguré ce lieu le 9 octobre 2024, après avoir démarré son activité en janvier 2023 et investi les deux derniers étés la cabane de Montamer, sur la plage de Sainte-Marie-de-Ré.
À l’origine de l’association, Jeanne Nicod et Maroussia Michaut, deux trentenaires qui ont sympathisé lors d’une expérience professionnelle antérieure et qui se sont retrouvées enceintes en même temps, confrontées aux mêmes questionnements. Que faire des chamboulements liés au fait de devenir parent ? Quelle place pour l’enfant dans l’espace public ? Où trouver des ressources et sortir de l’isolement ? La réflexion sur les manières de faire famille aujourd’hui est au cœur du projet du Bocal.
J’ai eu mon premier enfant en Argentine. Là-bas, toute une constellation de liens et une société accueillante facilitent beaucoup la parentalité. Ici, c’est plus compliqué. Je suis persuadée qu’il faut remettre du collectif pour élever les enfants !
Jeanne Nicod, co-fondatrice du Bocal
Autour de la volonté d’inclusion des enfants et de leur famille dans la vie sociale et culturelle de leur territoire, les deux fondatrices du Bocal ont conçu leur projet avec une volonté d’ouverture. Ateliers de motricité pour les aîné·es et les tout-petits, ateliers cuisine au fil des saisons, origami, musique africaine, conférences… le programme mensuel est varié. Une vingtaine de bénévoles gravitent autour des activités du lieu en clamant malicieusement qu’il faut « toute une île pour élever un enfant ! »
Sobriété et ressourcerie
Maman au foyer et habitante de Sainte-Marie, Nancy fréquente le Bocal toutes les semaines depuis l’été dernier. Pendant que ses deux filles de 18 mois et 3 ans s’amusent avec les jouets du local, elle témoigne : «On fait ici des rencontres d’autres parents, ce qui est rare sur l’île. Il y a des jeux, des activités. Et c’est ouvert sur de grandes plages horaires, ce qui est vraiment bien pour sortir de chez soi.»
Le lieu est décoré de manière sobre, avec des couleurs pastels. « Les enfants sont généralement sur-stimulés, nous voulions créer un espace reposant pour les sens. Agréable pour les parents aussi. Il y a volontairement très peu de jeux sortis à la fois, mais qui sont renouvelés souvent » Au fond de la salle, sur une petite table de café, on peut s’asseoir et commander une tisane, un café, une limonade ou un jus de pomme bio « et pour vos “demi-portions”, boissons format mini à moitié prix » car tout ici est pensé à hauteur d’enfant. Consciente des enjeux de sobriété et des difficultés financières des familles, l’association dispose d’un espace recyclerie où trouver des vêtements et des accessoires pour les 0-8 ans. Il est possible d’acheter à petit prix des vêtements de saison, et même de les échanger.
La CAF a reconnu Le Bocal comme un « Espace de vie sociale » en 2023, ce qui donne droit à un financement permettant de payer une partie du salaire des deux jeunes femmes. Lauréates de Pop incub, un dispositif de France Active Nouvelle-Aquitaine, elles ont été accompagnées pendant un an pour affiner le projet et ont le soutien de la région Nouvelle-Aquitaine dans le cadre de l’AMI Innovation sociale (soutien à l’expérimentation de projets socialement innovants). Une étape importante : « Cette aide nous donne une légitimité et nous conforte dans l’installation du Bocal dans la vie locale. » Le Bocal est un outil de lutte contre l’isolement, et les co-fondatrices ont encore de nombreuses idées d’animation pour grandir. « L’ile de Ré est un territoire particulier, rappelle Maroussia, avec 17 000 habitants seulement hors saison et 180 000 en été ! Cela reste un territoire rural avec beaucoup d’isolement des familles. »
La grande porte verte ouverte sur l’extérieur les jours de grand soleil suscite beaucoup de curiosité. Les habitué·es et les nouveaux parents qui discutent ce matin-là pendant que les enfants partent à la découverte des lieux l’assurent : ici, on se sent bien.
Rédaction et photos : Claire Marquis