Deux heures par semaine, ils planchent sur les causes et les conséquences du changement climatique. Au collège-lycée Fénelon Notre-Dame à La Rochelle, l’option « Demain c’est nous » est suivie par 16 élèves. Un groupe motivé, qui met en place une montagne de projets
Dans un recoin du CDI, de grands panneaux donnent le ton. « We are the future », est-il notamment écrit. Cette exposition sur le changement climatique trône derrière les tables des élèves, non loin d’ouvrages de l’écologiste Julien Vidal. Comme chaque jeudi, 16 jeunes du collège-lycée Fénelon Notre-Dame, à La Rochelle, s’installent dans le centre de documentation et d’information pour suivre l’option « Demain c’est nous ». Deux heures par semaine dédiées au changement climatique, instaurées depuis 2017 au sein de cet établissement privé.
Je trouvais ça incroyable que nous ne parlions pas des causes et conséquences du changement climatique en profondeur, hormis quelques lignes en géographie et en biologie. J’ai voulu proposer aux élèves des réflexions pratiques et concrètes, leur apprendre aussi à aimer et respecter la nature.
François Bernard, professeur de technologie à l’initiative de cette innovation pédagogique.
Accessible dès la troisième sur la base du volontariat, cet atelier se veut être un laboratoire de projets. En cette après-midi du mois d’octobre, il y a mille choses à mettre en place. « Le 11 novembre, je sais que c’est un jour férié mais vous allez organiser un rendez-vous en visio avec la glaciologue Heïdi Sevestre pour évoquer les enjeux de la COP 26 », annonce Claire-Hélène Bon, professeure d’anglais, l’autre enseignante qui chapeaute l’option. A planifier également, la rencontre avec les responsables de l’École polaire pour une sensibilisation à la fonte des glaces ; l’organisation d’un Skype avec un professeur de lycée en Suède, pays dans lequel « les questions environnementales ne sont pas en option » ; imaginer un diaporama avec « un problème qui vous touche sur le changement climatique, une solution », etc.
Agir pour les générations futures
La liste des projets est longue et l’implication va au-delà des deux heures hebdomadaires. « L’an dernier, nous avions trois heures », soupire l’enseignante, regrettant de ne pas bénéficier de davantage de temps. Même si ces créneaux sont jugés trop courts, les jeunes se donnent à fond. Eulalie Chalvet, 16 ans, s’est engagée pour « qu’il y ait des choses qui bougent ! Il faut agir pour que les générations futures aient un monde viable. Dans une forêt en feu, nous pouvons être le colibri qui apporte un peu d’eau », considère cette lycéenne en classe de première. La jeune fille a choisi cette option pour la deuxième année consécutive. L’an dernier, elle a tenu un stand de sensibilisation aux Francofolies de La Rochelle. « J’ai appris aussi à monter un projet jusqu’au bout. Grâce à ces cours, j’ai également découvert de nombreuses associations de protection des océans comme Surf Rider, Sea Cleaner, Echo Mer », ajoute-t-elle.
En première également, François-Xavier Bobrie n’a pas été bercé par l’écologie. « Ma famille n’est pas très investie sur cette question. Moi c’est une cause qui me tient à cœur mais je ne voulais pas m’engager dans une grande association, je ne m’y serais pas senti utile alors qu’au lycée, on connaît tout le monde. Et puis c’est plus pratique que ce soit pendant les cours », confie ce garçon de 16 ans, avant de compléter :
J’ai compris maintenant qu’il n’y a pas d’écologie politique au plan national et international. Ce n’est pas nous qui allons faire grandement bouger les choses mais je pense que c’est important de sensibiliser les gens et ensuite de faire pression sur les pouvoirs publics.
« Ça nous responsabilise »
A l’échelle de son établissement scolaire, François-Xavier aimerait que le self arrête « d’utiliser des choses en plastique, que ce soit des sacs ou des couverts ». Les discussions à ce sujet sont entamées. « C’est difficile de faire changer les choses. A la vie scolaire, il y a deux écrans allumés toute la journée qui ne servent à rien. Nous voulons y diffuser un diaporama sur le changement climatique mais le mieux serait carrément de les éteindre », estime Mathis Lefebvre-Bardeau, 15 ans, pour qui « l’écologie est quelque chose de primordial ». Mathis suit l’option « Demain c’est nous » pour la première année. « Ça nous responsabilise, car c’est à nous de monter nos projets », souligne le lycéen. Par Skype, l’équipe de jeunes est guidée dans son travail par des intervenants de renom comme Éric Brossier, navigateur et ingénieur en génie océanique ; Siiri Wickstöm, doctorante en géophysique et responsable météorologie ; le médecin et explorateur Jean-Louis Étienne, ou encore la glaciologue Heïdi Sevestre, avec laquelle ils ont tissé des liens particuliers.
En expédition dans l’Arctique
Avec cette glaciologue, 11 élèves de troisième ont vécu une incroyable aventure. En 2019, ils sont partis en expédition au Svalbard, un archipel norvégien situé dans l’océan Arctique. But de l’opération ? Constater, sur le terrain, le changement climatique sur cette terre composée d’énormément de glaciers. Accompagnés par leurs deux enseignants et un réalisateur, les collégiens ont passé une folle semaine à l’autre bout du monde. Enrichissante et déroutante à la fois, selon les dires de certains.
Le documentaire « Ça va Svalbarder », sorti fin 2019 et sélectionné, entre autres, au Festival du film d’aventure de La Rochelle (FIFAV) cette même année, retrace ce voyage stupéfiant.
Crise sanitaire oblige, cette coûteuse expérience n’a pas été renouvelée depuis. Si les conditions le permettent, en avril prochain, 16 élèves envisagent de passer une semaine dans la mer de glace, dans les Alpes. Toujours avec Heïdi Sevestre pour décrypter les données scientifiques. Hors des murs du CDI, l’engagement écologique des jeunes se poursuit puisqu’ils ont créé en 2017 l’association Demain c’est nous. Elle compte 45 membres à son actif, des élèves ou anciens élèves qui continuent à militer.
Rédaction : Amélia Blanchot
Photos : Théophile Trossat / photos expéditions au Svalbard : collège-lycée Fénelon