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Vivre au Peu accueille les plus démuni·es en milieu rural

par | 16 juillet 2024


Vivre au Peu est une association propriétaire de logements au sein d’un hameau situé entre Bressuire et Mauléon. Trente personnes isolées, à faible revenu et aux parcours de vie difficiles y sont déjà accompagnées et 10 nouveaux logements vont bientôt sortir de terre.


Il est 9 heures et comme tous les matins, un café attend les pensionnaires qui le souhaitent dans la salle commune. Au milieu de maisons ordinaires, une trentaine de personnes sont logées par l’association Vivre au Peu au sein du hameau situé au bord de la nationale entre Mauléon et Bressuire. Une quinzaine de migrants cohabitent ainsi dans une maison comprenant espaces collectifs et chambres individuelles, le temps de la procédure entre leur demande d’asile et la décision. « Avant, cela pouvait prendre 1 an et demi à 2 ans, on les accompagnait pour faciliter leur intégration. Maintenant les procédures sont accélérées, le public tourne plus vite, cela nous fait plus de travail » constate Gaëlle Bernaud, directrice de l’association. En bon voisinage, une douzaine de personnes aux parcours de vie difficiles sont hébergées en pension de famille de manière plus pérenne dans des logements individuels. Ce matin, on attend une intervenante pour une animation autour de la peinture. Éric a l’habitude de participer à l’atelier mosaïque du mardi et le jeudi c’est couture. Mais la peinture, il n’en n’a jamais fait. « Ça permet de découvrir d’autres choses, histoire de changer » explique-t-il. « Cet atelier, on l’a monté avec la bibliothèque dans le cadre d’un projet qui s’appelle « Facile à lire » et qui s’adresse au public éloigné de la lecture » explique Claire Chevalier, retraitée pétillante à l’initiative du projet. « La pension de famille s’adresse à un public en grande difficulté sociale, avec des revenus faibles, des problèmes d’endettement souvent liés au logement, » précise Armelle Legrand, une des cinq salariées de l’association Vivre au Peu. Aucun·e pensionnaire n’a d’emploi, mais ils et elles vont souvent prêter main-forte dans les structures Emmaüs de Mauléon. Une façon de s’occuper et de se rendre utile. Certain·es touchent une retraite, d’autres une pension d’invalidité d’adulte handicapé ou le RSA. Cela leur permet ainsi de payer une contribution pour le loyer et les charges. Mais pour que la pension de famille atteigne l’équilibre financier, dix nouveaux logements sont en cours de construction.

La pièce commune est toujours ouverte et chauffée pour accueillir les pauses cafés, les repas du midi pris en commun, les activités

Un accompagnement professionnel de proximité

« Avec bientôt 40 personnes hébergées, on s’est professionnalisé » explique Gaëlle Bernaud. « Il faut toujours trouver de nouveaux financements, rendre de plus en plus de comptes à l’État mais aussi s’adapter au changement de culture en cours. »  À une époque, les résidents étaient tous des anciens compagnons d’Emmaüs. La devise c’était “Les copains d’abord”. Georges, ancien prêtre ouvrier, a fait le choix de venir ici « pour vivre au plus près de l’essentiel, en accord avec mes opinions de fond. » Et il ne le regrette pas. « Depuis que je suis malade, je fais face à de nouvelles difficultés et ça me rapproche encore des autres résident·es. » Maintenant, les nouveaux arrivants n’ont plus le même profil et les notions d’entraide et de collectif sont moins évidentes. C’est aux animatrices d’œuvrer pour maintenir les liens sociaux en organisant des petits chantiers ou des animations.

Contrairement aux pensions de familles disséminées en milieu urbain, où les pensionnaires doivent se rendre dans des bureaux pour le suivi de leur accompagnement, ici « on est sur place toute la semaine, explique Armelle. De manière plus ou moins formelle, on est un grand tableau d’orientation, s’amuse-t-elle. On fait de la mise en lien avec des professionnel·les : infirmier·ère, juge, avocat·e, assistant·e social·e. On explique qui fait quoi et comment les contacter. On peut aussi aider à organiser des départs en vacances, ou à reprendre contact avec de la famille. On accompagne celles et ceux qui le souhaitent à se projeter ailleurs qu’ici. C’est un public très fragile donc tout cela prend du temps. On accompagne, on ne pousse pas en avant. »

Gros chantier en cours au sein du hameau pour accueillir prochainement une dizaine de pensionnaires supplémentaires

Un réseau de bénévoles impliqués

Les rapports humains sont au cœur du projet associatif qui repose aussi sur une équipe de bénévoles actifs. Claire vient depuis 40 ans apporter son soutien. « Les résident·es, je les connais depuis très longtemps. Je me sens à l’aise avec eux, je sais y faire maintenant, même quand le ton monte. » Comme dans tout collectif, « il y a des personnalités qui ont tendance à prendre beaucoup de place alors d’autres se rebiffent. Ils ont un passé tellement dingue, ça a forgé leur personnalité. Ils ont dû se battre contre les réalités de la vie, s’ils n’avaient pas été comme ça, ils auraient plongé dans l’alcool ou je ne sais quoi. » Comme Claire, une vingtaine de bénévoles vient régulièrement assurer les transports vers les rendez-vous médicaux ou proposer des activités comme des visites de fermes, des sorties à la fête de la musique, des après-midis jeu, ou l’atelier peinture du jour. Ce sont des temps importants où migrants et pensionnaires se mélangent. Et tous les midis, un binôme résident·e/bénévole assure un repas, proposé du lundi au vendredi à celles et ceux qui le souhaitent. « Depuis que je suis à la retraite, précise Claire, je viens au moins une fois par mois pour la préparation des repas. » L’occasion pour elle d’entrer parfois en contact avec les migrants qui sont globalement plus difficiles à mobiliser sur les activités proposées. « Avec les demandeurs d’asile, je parle anglais, c’est un plaisir pour moi, même s’il faut parfois recevoir des témoignages poignants, confie la bénévole. Pendant que tu coupes des oignons, ils te parlent de leur famille, de leur voyage. Ce sont de jeunes hommes qui arrivent d’Afghanistan, du Bengale ou d’Afrique de l’Ouest. Ils sont en pleine reconstruction. J’écoute, il n’y a rien à dire. C’est tellement compliqué pour eux. Quand ils arrivent là, ils débarquent. Leurs familles sont éclatées, il y en a sur tous les continents, ils ne les reverront plus jamais. Quand on cuisine ensemble il se passe des trucs chouettes pour eux mais pour moi aussi, ils ont plein de choses à nous apporter. »


Rédaction : Marie Gazeau
Photos : Marie Queinec

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