Comment faire prendre conscience des enjeux écologiques au-delà des personnes déjà convaincues ? Pour sensibiliser le grand public à la préservation de la rivière, le syndicat mixte de la Vallée du Thouet (79) et des associations environnementales ont décidé d’aller à la rencontre des habitant·es là où ils et elles se trouvent: sur le marché de Thouars.
Au cœur du dynamique marché de Thouars, entre les étals de vêtements, de montres et ceintures en tout genre, le canoë vert fluo monté sur roulettes ne passe pas inaperçu. Les badauds le regardent, s’arrêtent parfois et il n’en faut pas plus aux animateurs nature pour lancer la conversation : « Nous sommes ici pour parler du Thouet, vous le connaissez ? » lance Guillaume Bitton, animateur de l’association Détour dans l’eau. « Oui je m’y promène souvent, répond cette femme aux vêtements colorés. J’adore, il y a plein d’oiseaux. L’autre jour j’en ai vu un bleu tout petit comme une hirondelle mais tellement bleu, je ne sais pas ce que c’était. » L’occasion est trop belle pour Romain Chisson, animateur au Groupement Ornithologique des Deux-Sèvres, de présenter le martin pêcheur « qui fait son nid en creusant un terrier dans les berges. »
Au milieu des explications ornithologiques, les plus curieux s’approchent de l’embarcation pour jeter un coup d’œil à son contenu. « C’est comme une sortie en nature, explique Guillaume, il faut être curieux, soulever quelques pierres pour voir la vie qui grouille en dessous. Nous, au fond de notre canoë, il y a quelques trésors. » Plumes d’oiseaux, morceau de bois grignoté par un castor, tête de sandre séchée… de quoi lancer les discussions. Et c’est bien l’objectif de cette maraude. Faire parler du Thouet pour comprendre la relation que les habitant·es entretiennent avec leur rivière. Recueillir la parole de pêcheurs, de randonneurs, de cyclistes… Les animateurs en profitent pour présenter les activités culturelles ou sportives que leurs associations proposent et distribuent des fascicules sur les aménagements et l’entretien de la rivière réalisés par le syndicat mixte de la Vallée du Thouet.
Une maraude écolo pour toucher un public plus large
C’est le syndicat qui est à l’origine de cette maraude écolo. En charge du tourisme et de la gestion des milieux naturels, tout un volet de son action est basé sur la communication et la sensibilisation du grand public.
« On avait fait le tour des écoles, et quand on fait des animations grand public, les gens qui participent nous connaissent déjà. L’idée du maraudage est de toucher un public plus large. C’est la première fois que l’on mène ce type d’action. C’est un test qui doit nous permettre de mieux comprendre la relation que les habitants entretiennent avec la rivière.»
Maëlle Martinez technicienne de rivière au syndicat
Les plus anciens témoignent ainsi de son évolution. En 50 ans, la morphologie du Thouet a changé et les échanges sont précieux pour retracer l’histoire de la rivière, de ses méandres et de ses moulins. Les pêcheurs apportent un regard sur les populations de poissons présentes. Certains confirment qu’il y a avait de la truite sauvage il y a dix ans alors qu’aujourd’hui on y trouve des perches soleils qui sont normalement des espèces d’étang. Les promeneur·euses peuvent parler des niveaux d’eau, de la présence des espèces invasives comme la jussie, de la disparition des libellules.
De riches échanges improvisés
Force est de constater que la majorité des badauds connaissent la prairie des Ursulines à Thouars, mais s’aventurent peu à la découverte du reste de la rivière. Certain·es par dépit, « ce n’est pas évident de trouver des accès pour personnes à mobilité réduite », lance une dame qui accompagne des personnes en fauteuils roulants. Voilà peut-être une piste d’action à prévoir. « Pour le moment on ne sait pas ce qui sera fait de toutes ces paroles recueillies », explique Maëlle Martinez. « On n’a pas de but précis, confirme Romain Chisson. Dans les autres animations on appréhende les choses différemment. On a notre speech dans la tête et on s’adresse à des gens qui ont fait la démarche de venir. Là, on parle plus avec les gens, on les écoute, on recueille ce que les gens pensent ou ont vu et on fera le bilan après. »
Pour l’heure, la petite troupe est agréablement surprise par la disponibilité et la richesse des échanges avec ce public improvisé. Les gens s’arrêtent facilement et de petits groupes se forment. « On pensait qu’ils seraient pressés de faire leur courses mais finalement ils prennent le temps, constate Guillaume Bitton. En itinérance, ça fonctionne bien mieux que si on tenait un stand », affirme-t-il avant de reprendre en main le canoë et son drôle d’équipage pour remonter le flot humain vers les odeurs alléchantes qui s’échappent des Halles.
Rédaction : Marie Gazeau
Photos : Marie Queinec